Jeanne Lafon
Fata morgana - Film - 2012
présenté dans le cadre de l'exposition Panorama 14
Film
Puisqu'il le faut, entraînons-nous à mourir, à l’ombre des fleurs
Une plage, la mer, une peupleraie et une femme. L’horizon est toujours au centre, l’image presque carrée. Tout semble être à taille humaine, mais l’homme est perdu. Jeanne Lafon nous fait entrer dans un espace où le temps ne semble pas exister, les espaces sont infinis, la temporalité hors d’échelle. Le spectateur se retrouve dans une dimension onirique, où la pensée n’obéit à aucune logique. L’homme face à l’immensité et à l’indifférence de la nature renonce à toute activité ayant une finalité et il s’ennuie. Mais cet ennui est positif, un ennui méditatif. La contemplation du vide nous amène à une introspection rationnelle qui stimule notre réflexion sur la condition humaine et fait éclore nos sensations face à la nature.
Si à première vue le travail de Jeanne Lafon semble s’apparenter à un romantisme « moderne », ses considérations s’appuient sur des études scientifiques sur l’environnement, l’univers, les problématiques relatives à l’énergie nucléaire, mais encore sur le concept de vide, qu’il soit ambiant ou sémantique. L’homme, immergé dans une dimension temporelle déterministe et linéaire, n’est pas en mesure de réaliser la lenteur, la cyclicité, la puissance, l’immortalité et l’indifférence de la nature.
Bien que la situation soit tragique et apparemment sans espoir, les conclusions restent ouvertes : la femme sur la plage, est-elle morte ou dort-elle ? Faut-il ignorer ces réflexions ou abandonner chaque certitude et devenir fatalistes ?
Le travail s’organise selon de longs plans-séquences, influencés par le cinéma d’Andrei Tarkovski et de Wim Wenders. Lents mouvements, sons délicats, l’œuvre est riche de références symboliques et littéraires. Le film accueille le spectateur dans un rêve – ou plusieurs rêves – où les sensations sont les protagonistes.
En conclusion, il nous reste à nous demander ce qu’il va nous rester, au moment où notre ego est détruit et que tous nos biens matériels finissent par perdre leur signification, dans une perspective infinie telle que celle de l’univers. Sommes-nous la femme du rêve ou sommes-nous en train de la rêver ?
Alice Ensabella
Jeanne Lafon
Née en 1987 à Aubervilliers
Vit et travaille à Lille
Cursus Ecole Nationale Supérieure du Paysage de Versailles
Production
Remerciements
Claudine Faunières, Jonathan Pia, Jean-René Lorand, Daniel Dobbels, Arnaud Laporte