Le pouvoir de la fiction
Rencontre #4 | Sciences et fictions de l’Humain
mer. 12 mar. 2025
14h00 > 19h00
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Salle Cocteau
En accès libre
Lorsqu’on pense aux rapports qu’entretiennent science et fiction, viennent couramment à l’esprit la science-fiction, qui puise son imaginaire dans celui de la science, et la dissémination des savoirs scientifiques, qui recourt volontiers à la fiction pour rendre ceux-ci accessibles à un large public.
La fiction semble dans les deux cas intervenir dans un second temps, comme si elle était subordonnée à la science. Or cette perspective ne rend pas compte de l’influence mutuelle qui existe entre l’une et l’autre.
Les productions scientifiques mobilisent souvent des imaginaires préexistants, provenant en partie de la science elle-même (par exemple, le modèle atomique de Rutherford inspiré d’un système planétaire), mais également de la culture et des œuvres artistiques de l’époque dans laquelle elle se situe.
Certaines périodes voient l’émergence de courants artistiques qui reflètent et amplifient des préoccupations collectives, influençant la trajectoire des recherches scientifiques, ces fictions participant activement à orienter la manière dont une société se projette dans le futur, conçoit les progrès scientifiques et technologiques, et construit à la fois ses rêves et ses inquiétudes face aux innovations techno-scientifiques.
Comment ces mouvements ont-ils façonné la science ? Et qu’enseignent-ils sur les relations actuelles entre science, culture et création ?
La science comporte également une part de fiction avérée dans ses méthodes.
Comme l’a montré Bruno Latour, les faits scientifiques ne sont pas de simples observations objectives, mais des constructions stabilisées au sein de contextes socio-culturels (par exemple, les choix stratégiques d’un gouvernement, inspiré par des espoirs et des craintes véhiculés par l’imaginaire collectif).
Dès lors, l’idée d’employer la fiction non plus uniquement comme un moyen annexe, mais comme une véritable modalité de production scientifique, revêt une certaine pertinence.
Celle-ci autorise une spéculation libérée des contraintes institutionnelles, ouvrant des espaces d’expérimentation mentale où des intuitions non prouvées (ou non prouvables) ou des hypothèses parfois trop audacieuses aux yeux de l’institution scientifique peuvent néanmoins enrichir l’imaginaire scientifique.
Ces pratiques suscitent des interrogations : la fiction peut-elle être reconnue comme un outil légitime au sein de la recherche scientifique ? Jusqu’où peut-elle s’écarter des cadres conventionnels sans nuire à la rigueur et à la crédibilité de la science ? Quels types de savoirs la fiction permet-elle de produire, que les approches académiques traditionnelles ne sauraient atteindre ?
Intervenant·es
Vinciane Despret, philosophe et psychologue
Jeremie Brugidou, artiste-chercheur, cinéaste et docteur en arts
Matthieu Duperrex, maître de conférences en sciences humaines à l’École nationale supérieure d’architecture de Marseille
Fleur Hopkins-Loféron, docteure en histoire des images et rédactrice pour plusieurs revues telles que La Septième Obsession ou Les Cahiers de la BD